Vue de l’installation de Joan Jonas, The Come to Us without a Word (Mirrors), 2015. Pavillon étatsunien à la Biennale de Venise, 2015. Photo : Moira Ricci / MIT List Visual Arts Center.
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Biennale de Venise
56e Exposition internationale d’art : All the World’s Futures 5 mai au 22 novembre 2015 La Biennale de Venise, la plus ancienne des biennales d’art contemporain, célébrait en 2015 son 120e anniversaire. Pour cette 56e édition, l’Exposition internationale d’art, intitulée All the World’s Futures, a été dirigée et commissariée par Okwui Enwezor, assisté pour l’occasion de Markus Müller et Tim Roering ainsi que de l’organisatrice artistique et de la directrice de publication Luz Gyalui. L’impressionnante organisation livre un évènement tentaculaire puisant à même la création artistique contemporaine mondiale. Car, il faut le souligner, l’Exposition internationale d’art présentée au Pavillon central ainsi qu’à l’Arsenale réunit le travail de 136 artistes en provenance de 53 pays. On peut mesurer l’apport d’Enwezor – éminent commissaire d’exposition nigérien, directeur de la Haus der Kunst de Munich – à la représentativité des nationalités en comparant les chiffres de cette exposition avec ceux de l’édition précédente qui rassemblait déjà des artistes issus de 38 pays différents. Et que dire des innombrables pavillons nationaux, au nombre de 89 en 2015, dont plusieurs proposent des projets admirables, et de la quarantaine d’évènements collatéraux ? En d’autres mots, la Biennale de Venise demeure insaisissable dans sa totalité pour la majorité de ses visiteurs. Et rédiger un compte rendu exhaustif de l’évènement relève en ce sens de l’utopie. La critique ici proposée se veut donc un bilan partiel de l’exposition, trahissant un parti pris pour certains moments forts ainsi qu’un intérêt marqué à l’égard de la contribution singulière de l’évènement aux discours entourant les grands enjeux de notre époque. All the World’s Futures, en plus de privilégier les esthétiques les plus diverses – et, comme le souligne Benjamin Buchloh, en ignorant les prescriptions du marché de l’art[1] –, propose aux visiteurs un panorama étoffé d’une production contemporaine qui témoigne des pressantes réalités sociopolitiques et culturelles de notre temps. Bon nombre des œuvres présentées exposent au regard l’existence en zone de guerre ; les grandes manifestations menées contre un pouvoir totalitaire ; les conditions de travail aliénantes découlant du capitalisme ; la vie dans les ghettos ; les effets des changements climatiques sur les habitats. Pour Enwezor, l’exposition, contrairement à l’art et à l’artiste, ne peut se désengager du monde et de son sort. « An exhibition is something that happens in the world, and carries with it the noise, pollution, dust, and decay that come from that world. Like the growing mass of debris, it is part of the messy world it inhabits »[2]. Véritable forum public où est examiné l’état des choses, All the World’s Futures convoque un ensemble d’approches : pratiques archivistiques, cinématographiques, commissariales, conceptuelles, DIY, documentaires, électroniques, installatives, performatives, photographiques, picturales, sculpturales, sonores, vidéographiques, pratiques rattachées à la critique institutionnelle, ou encore, œuvres en forme de musée ou de cabinet de curiosité, de chorégraphie, d’intervention in situ, d’instrument de musique ou de partition musicale. Se rassembler autour de choses Dans son essai, le commissaire dresse une sorte d’inventaire à la lumière des grands bouleversements de l’heure, tout en esquissant l’histoire de la Biennale et en retraçant les évènements qui l’ont marquée. Le sens du terme chose sur lequel s’appuie Enwezor nous ramène non seulement aux objets inanimés, à la matière/aux affaires/à la substance (matter), mais aussi aux préoccupations (concern) ainsi qu’à la rencontre (meeting)[3]. Le terme anglais thing, tout comme le mot du vieux haut-allemand ding, est d’ailleurs équivalent à celui de sujet de préoccupation et peut aussi référer à un rassemblement où l’on discute de sujets qui divisent[4]. Pour le sociologue Bruno Latour, « […] les choses — prises comme autant d’enjeux – nous lient d’une façon telle qu’une nouvelle carte de l’espace public est dessinée, profondément différente de ce qui est habituellement identifié sous l’étiquette du politique »[5]. En plus des œuvres exposées en galerie, l’exposition commissariée par Enwezor comprend un lieu dédié au rassemblement, l’Arena, conçu par l’architecte David Adjaye. C’est là qu’est livré tous les jours devant public un imposant programme qui s’appuie sur de nombreuses performances, récitations – notamment à partir de l’œuvre de Joana Hadjithomas & Khalil Joreige –, chansons et compositions musicales originales – par exemple, les œuvres de Jeremy Deller, Mathieu Kleyebe Abonnenc ainsi que celles de Jason Moran & Alicia Hall Moran –, échanges ouverts au public, films, ainsi qu’une lecture à voix haute de l’ouvrage monumental de Karl Marx, Das Kapital, intitulée Das Kapital Oratorio et que dirige l’artiste et réalisateur britannique Isaac Julien. Cette programmation n’est pas sans rappeler les Platforms de la Documenta 11 qu’avait dirigée Enwezor en 2002 et qui s’étaient déroulées sur quatre continents au cours d’une période de 18 mois et lors desquelles des discussions publiques, débats et ateliers de toutes sortes avaient eu lieu autour de grandes questions d’actualité. Le projet réalisé par Enwezor à Venise repose également sur la notion de parlement de formes, autre concept cher à Latour, qui l’avait d’ailleurs employé avec Peter Weibel comme modèle pour concevoir le scénario de l’exposition Making Things Public: Atmospheres of Democracy, présentée au ZKM de Karlsruhe en Allemagne en 2005. Le parlement évoque d’emblée la figure du médiateur, incarnée ici par l’œuvre, qui représente autant d’enjeux ou de choses, mais également par l’artiste, qui se penche sur les réalités concrètes de notre monde, et par le commissaire d’exposition qui rassemble et expose tout à la fois des œuvres et des enjeux. L’ouvrage de Marx tient un rôle clé dans le scénario d’All the World’s Futures, insufflant une impulsion à toute l’entreprise et constituant l’un des filtres, terme employé par Enwezor, qui permettent de comprendre les propositions réunies. L’exposition se décline ainsi en quelque trois axes théoriques ou filtres : en plus de « Capital : une lecture en direct », on compte « Liveness : une durée épique » ainsi que « Jardin du désordre ». Se déployant à travers une enfilade d’espaces architecturaux, géographiques et urbanistiques, l’exposition est finement structurée par cette conception théorique du commissaire et les discours qui s’y rattachent. Revisiter l’Exposition internationale d’art All the World’s Futures L’itinéraire d’All the World’s Futures s’amorce au Pavillon central, situé au cœur du Giardini depuis 1998, et se poursuit à l’Arsenale. Cette année, l’évènement constitue, à la manière de la 55e édition et de celle dirigée par Bice Curiger en 2011, l’une des trois grandes expositions-recherche que l’organisation de la Biennale se plaît à promouvoir. Si Massimiliano Gioni avait en 2013, avec l’exposition The Encyclopedic Palace, exploré la variété des formes que l’organisation visuelle d’un savoir universel peut emprunter, cette année, ce sont les choses, telles qu’elles sont modelées par le capitalisme, vues à travers les yeux de l’artiste – et à la lumière de la pensée de Marx – qui ont intéressé le commissaire. Afin d’examiner cette matière à préoccupation, Enwezor a choisi d’inviter non seulement des artistes actuels, mais aussi de convier quelques-uns des pionniers et précurseurs de l’art contemporain, certains parmi eux toujours actifs, et d’autres, disparus. Ont ainsi été réunis Marcel Broodthaers, Walker Evans – dont la série de photographies Let Us Now Praise Famous Men (1936) réalisées dans le contexte de l’enquête de la Farm Security Administration sont bien mariées avec les maquettes de sculpture publique d’Isa Genzhen –, Hans Haacke, Bruce Nauman, Chris Marker, Fabio Mauri – à qui un imposant hommage posthume est rendu –, Adrian Piper – récompensée par le Lion d’or de la meilleure artiste pour l’œuvre The Probable Trust Registry : The Rules of the Game #1–3 –, Robert Smithson, ainsi que l’auteur et cinéaste allemand Harun Farocki – dont les 87 films sont littéralement noyés dans la mer des œuvres à voir à l’Arsenale… Plus en amont dans le parcours, l’œuvre intitulée Labor in a Single Shot (2011–2014), une collaboration de Farocki et de sa conjointe, la cinéaste Antje Ehmann, montre la dure réalité d’une multitude de travailleurs issus de divers contextes culturels. Afin de repousser les limites de leur investigation, les deux cinéastes ont fait appel à des réalisateurs provenant d’une quinzaine de villes dans le monde afin que ceux-ci explorent cette réalité dans un clip de moins de deux minutes, sans montage. Ces invitations ont mené à la production de quelques 450 vignettes qui ont ensuite été assemblées et projetées sur cinq écrans distincts, révélant la nature des rapports existant entre travail et travailleurs. Cette filière thématique de la condition ouvrière à l’ère de la mondialisation représente l’un des fils conducteurs reliant certains des îlots créés à l’intérieur de l’exposition. À titre d’exemple, citons la Gulf Labor Artist Coalition (GLC) dont les membres dénoncent les piètres conditions de travail de ceux qui œuvrent à la construction du Guggenheim Abu Dhabi sur l’ile de Saaiyat. Ces membres se sont exprimés lors d’échanges tenus à l’Arena ainsi que par le truchement d’une œuvre en forme de banderole affichée à l’Arsenale. Le documentaire Factory Complex (2014) du Sud-Coréen Im Heung-Soon, à qui le jury a décerné le Lion d’or du meilleur jeune artiste, en est un autre exemple. Cette œuvre d’une grande sensibilité expose – à travers une série d’images et d’entretiens menés auprès de jeunes ouvrières d’hier et d’aujourd’hui – l’injustice de la situation de celles qui sont employées par des manufactures coréennes et pour qui l’absence de mobilité sociale se perpétue de générations en générations. Dans un tout autre registre, l’artiste étatsunienne Mika Rottenberg présente l’œuvre de fiction NoNoseKnows (2015) qui examine librement les questions de l’exploitation des ressources naturelles et des conditions de travail des femmes. Fidèle à son habitude, l’artiste a conçu une œuvre reposant sur une architecture onirique, qu’elle a construite de toutes pièces en atelier. L’œuvre vidéographique se déroule entre des locaux administratifs génériques, une chaîne de montage invraisemblable et une grotte sinistre d’où sont extraites les perles qui servent de matière première et que transforment les ouvrières. De cette succession d’actions découle un portrait caricatural caustique du système de production mondialisé. Ce jardin du désordre que constitue All the World’s Futures, avec ses interminables allées et ses enfilades d’espaces où une multitude d’œuvres sont données à voir, nourrit le visiteur de propositions foisonnantes et engagées. Cette image du jardin du désordre, prise au sens figuré, évoque l’état de notre monde dont les perturbations se font de plus en plus ressentir, ne serait-ce que par le biais des conflits qui y font rage, mais également par les bouleversements climatiques et écologiques. Dérive environnementale et passé colonial s’entrecroisent dans l’installation filmique Vertigo Sea : Oblique Tale of the Aquatic Sublime (2015) inspirée du Moby Dick de Melville et réalisée par le cinéaste britannique d’origine ghanéenne John Akomfrah. Remix d’archives de la BBC Natural History Unit et de séquences tournées pour l’occasion, l’œuvre est composée de trois projections numériques sur écrans distincts. Poème épique et poignant, l’œuvre d’Akomfrah transporte au-delà des mers et des temps : des prises de vues à couper le souffle s’y enchaînent au rythme d’une narration changeante alors que d’anciennes scènes de chasse à la baleine alternent avec des images qui évoquent la traite des esclaves. Filmés dans leur habitat, l’ours polaire et les animaux marins apparaissent au spectateur comme à la croisée des chemins, leur trajectoire en tant qu’espèces devenant de plus en plus incertaine. Les pavillons nationaux de la 56e édition de la Biennale La question cruciale de l’environnement et des rapports entretenus par l’humain avec les autres espèces animales et les végétaux est soulevée par plusieurs des œuvres qui se trouvent dans les pavillons nationaux du Giardini. Le travail de l’artiste Joan Jonas, à qui le jury de la Biennale a attribué une mention spéciale, est présenté dans le pavillon néoclassique étatsunien dans une forme installative. L’œuvre They Come to Us Without a Word, réalisée entre 2013 et 2015, s’appuie sur le dessin, la performance, la sculpture, la littérature, la musique et la vidéo. Usant d’un langage plastique qui s’apparente à l’art naïf, Jonas tisse habilement une toile dans laquelle s’entremêlent des légendes – dont certaines proviennent du Cap-Breton – et des représentations de créatures comme les abeilles, les chiens et les poissons que l’artiste a filmés et dessinés. L’œuvre propose une réflexion autour de la disparition d’une nature dont nous faisons nous-mêmes partie, mais qu’étrangement nous ne connaissons que peu et mal. Au cœur du parcours créé par Jonas, l’espace central du pavillon renferme une collection de miroirs, commandés à des artisans vénitiens, identiques à ceux qui abondent dans les grands palais. La proposition de l’artiste a quelque chose de merveilleux : elle nous transporte à des kilomètres de la Biennale et du monde de l’art, dans un endroit où des enfants et des fantômes font la ronde autour d’un feu de bois, animés par un récit plein d’intelligence. L’un des pavillons incontournables de cette 56e Biennale est sans doute celui de la Grèce, transformé par l’artiste Maria Papadimitriou en un atelier-boutique de tanneur, pour l’œuvre Why Look at Animals ? AGRIMIKÀ (2015). Reconstitution à l’identique d’un atelier de Vólos, littéralement transporté jusqu’au Giardini, l’œuvre investit l’entièreté du pavillon qu’elle laisse dans un état qui frôle l’abandon et la décrépitude. Dans un entretien filmé, le parcours de l’artisan propriétaire de l’atelier de tannerie est retracé, tout comme l’est le passé glorieux d’une industrie désormais déchue. Le premier volet du titre de l’œuvre est inspiré d’un ouvrage de John Berger, About Looking (1980), dans lequel l’auteur examinait l’évolution historique de nos rapports aux animaux ; alors qu’AGRIMIKÀ désigne les espèces sauvages qui ne pourront jamais être domestiquées. Cette installation s’apparente à celle que le collectif BGL a réalisée pour le pavillon du Canada. Sous des abords humoristiques, Canadassimo, en recréant de façon réaliste le dépanneur de quartier et l’atelier du patenteux, deux entités propres à un Québec d’autrefois, évoque le pittoresque d’une culture populaire elle aussi appelée à disparaître. À deux pas du Pavillon central, les Pays-Bas présentent le travail d’herman de vries, pionnier du Land Art, connu pour ses marches en forêt et ses interventions à peine perceptibles. Dans le contexte de cette invitation, de vries a entrepris de visiter Venise à de nombreuses reprises, recueillant au passage des échantillons d’espèces de plantes vivant sur les îles de la lagune qui ont contribué à augmenter son imposante collection classée sous forme d’herbier. L’approche existentialiste de l’artiste s’est cristallisée dans l’installation to be all ways to be qui occupe l’espace lumineux du pavillon néerlandais ainsi qu’à travers sa composante in situ. En effet, chaque jour, vingt visiteurs de la Biennale ont pu grimper à bord d’une petite embarcation les menant jusqu’à l’île Lazzaro Vecchio, où l’artiste a parsemé, entre bâtiments en ruine et herbes folles, des inscriptions de marbre soulignant le primat de l’existence. Ce voyage est l’occasion pour les participants de découvrir un pan de l’histoire médiévale de Venise, à l’époque où la cité menait une lutte acharnée contre la peste noire. Les visiteurs doivent aussi emprunter les eaux de la lagune pour accéder au pavillon de l’Arménie, situé sur l’île de San Lazzaro degli Armeni, où se trouve le monastère Mekhitariste. Arborant une plaque érigée en l’honneur de Lord Byron et qui le consacre ami du Peuple arménien, le bâtiment comprend notamment un cloître et ses jardins, une bibliothèque ainsi que de nombreuses salles et chapelles. Décorée du prix de la meilleure participation nationale, l’Arménie a, pour la commémoration du centenaire du génocide des Arméniens, misé sur les artistes de sa diaspora. Armenity soulève des questions liées à l’identité et à l’histoire – tant familiale que nationale –, au langage et au sentiment d’appartenance. Parmi l’ensemble des propositions réunies à l’occasion de cette exposition thématique, soulignons l’œuvre Treasures (2015) de Silvina Der-Meguerditchian, une installation in situ réalisée à partir de dessins, de vidéos et d’objets, à même les vitrines du monastère, autour d’un recueil de médecine populaire rédigé en caractères arméniens par l’arrière-grand-mère de l’artiste en 1944. Citons également l’installation vidéo à six moniteurs Accent Elimination (2005) de l’artiste Nina Katchadourian, née d’une mère suédoise et d’un père arménien. Deux scénarios y sont proposés, chacun sur trois écrans, où les parents et l’artiste révèlent l’origine de leurs accents et entreprennent une série de leçons pour maîtriser l’inflexion particulière de la voix de l’autre. Parmi les grands joueurs nationaux, la Belgique se démarque grâce au travail de la commissaire Katerina Gregos et de l’artiste Vincent Meesen, qui ont ensemble convié dix artistes en provenance de quatre continents et d’autant d’univers culturels à réfléchir au passé colonial belge. Personne et les autres[6] court-circuite les récits standardisés, autant du point de vue expositionnel – en réunissant le travail d’artistes autrefois absents des pavillons attribués aux pays colonisateurs –, que des discours – en formulant des versions alternatives à la modernité eurocentrique. Avec son installation One.Two.Three (2015), Meesen entreprend une sorte de pèlerinage qui s’est amorcé à partir des archives de Raoul Vaneigem, avec les paroles d’une chanson composée par le situationniste congolais Joseph M’Belolo Ya M’Piku lors des évènements entourant Mai 68. Tournée au club de jazz congolais Un Deux Trois, l’œuvre qui se veut dérive musicale, réinvestit tout un pan de l’histoire du mouvement situationniste international demeuré dans l’ombre. L’art tel qu’il est montré à Venise représente une multitude de voix et de sujets de préoccupation. Certaines de ces voix résonnent jusque dans les derniers retranchements de l’Arsenale, comme celle du collectif syrien Abounaddara qui a recueilli à travers l’enregistrement vidéographique les espoirs et les désespoirs d’une jeunesse laissée seule face au totalitarisme et qui a fait le choix de s’engager dans la lutte. Ces voix résonnent jusqu’aux portes du jardin Landscape for an Event Suspended Indefinitely (2015) de l’artiste Sarah Sze et celui d’Emily Floyd, Labour Garden (2015). Elles se font entendre dans l’œuvre Regular Places (2014) de l’artiste et commissaire Mykola Ridnyi qui se déroule à Kharkov, en Ukraine, et qui superpose paysages urbains déserts et trame sonore révélant les évènements violents des derniers mois. Le dispositif de l’exposition-forum d’Enwezor rend publiques autant d’œuvres issues de réalités les plus hétérogènes, produisant par le fait même une assemblée offrant le portrait d’une étonnante profondeur d’un monde en mouvement et dont les trajectoires passées, présentes et futures se retrouvent ici entrecroisées. Détentrice d’un doctorat en en études et pratiques des arts, Geneviève Chevalier est stagiaire postdoctorale FRQSC en muséologie et patrimoines à l’École multidisciplinaire de l’image de l’Université du Québec en Outaouais. [1] Benjamin H. D. Buchloh, « Biennale on the Brink », Artforum International, vol. 54, no 1, septembre 2015, p. 309. [2] Okwui Enwezor, « All the World’s Futures », dans Luz Gyalui et Okwui Enwezor (ed.), La Biennale di Venezia : 56th International Art Exhibition: All the World’s Futures, vol. 1, Exhibition, Venise, 2015, p. 17. [3] Bruno Latour, « From Realpolitik to Dingpolitik or How to Make Things Public », dans Bruno Latour et Peter Weibel (ed.), Making Things Public : Atmospheres of Democracy, Dusseldorf et Cambridge, Mass., 2005, p. 22. [4] Martin Heidegger, « The Thing », dans Poetry, Language, Thought, trad. Albert Hofstadter, New York et Londres, [1951] 1974, p. 174. [5] Latour, « From Realpolitik to Dingpolitik », p. 15. [6] Le titre est celui d’une pièce de théâtre perdue de l’auteur belge André Franklin, associé aux mouvements lettriste et situationniste internationaux. Vertical Divider
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